Zaho de Sagazan c’est une voix singulière et puissante, de celles qui font dresser nos poils. Un timbre grave porté par des rythmes électroniques qui côtoient la techno berlinoise et l'electronica française.
Passant des murmures aux cris, l’artiste de 24 ans s’amuse, se raconte et dissèque les travers humains sur des textes en français d’une sincérité tranchante. Ses mots, drapés de mélodies puissantes à la mélancolie subtile, nous plongent dans une intimité partagée, où l’on goûte à la délicieuse liberté de danser, de penser et de s’émouvoir.
Au côté de son batteur Tom Geffray, Zaho nous livre une Krautpop moderne inspirée de ceux qui l'ont fait danser tels que Koudlam ou Autumn. Côtoyant la folie de Catherine Ringer ou Brigitte Fontaine vient toujours le moment où elle retourne s’asseoir les yeux fermés à son piano, fidèle allié de ses créations.
Un an à peine après la sortie de son premier album, elle atteint à une vitesse inédite de folles altitudes. Avant elle, jamais personne n’avait emporté quatre Victoires de la musique au cours d’une seule soirée avec un tel parfum de palmarès inaugural – album de l’année, chanson originale, révélation féminine, révélation scène.
La scène, justement : après les 116 concerts en 2023 et ses premiers Zénith en mars 2024 à Paris et à Nantes, toujours joués à guichets fermés, elle enchaîne les festivals d’été et va continuer à fréquenter les grandes salles en France tout en explorant aussi davantage l’Europe non-francophone. Lauréate des deux prix les plus convoités aux Music Moves Europe Awards créés par l’Union européenne, le prix du jury et le prix du public, l’élan est donné. Qui se souvient d’une « première tournée » aussi impressionnante ? Et même les chiffres de vente font sens : elle atteint officiellement le seuil de l’album d’or le jour de Noël, celui du platine le jour anniversaire de la sortie de l’album.
Quand, le 31 mars 2023, La Symphonie des éclairs sortait, l’album confirmait la rumeur surexcitée circulant depuis l'enchaînement prometteur des événements de l’année précédente – quelques premiers concerts, les Inouïs du Printemps de Bourges, le Chantier des Francos, le prix Chorus des Hauts-de-Seine, les TransMusicales de Rennes…
Aujourd’hui, les premières cohortes de fans expliquent à leurs cadets en zaholâtrie leurs premières sensations d’alors face à cette voix si singulière. La matière en serait un velours métallique ; la texture, à la fois moelleuse et rêche ; le mouvement, quelque part entre la vague d’air soulevant la soie et l’onde que fait une pierre de taille jetée à la surface d’un lac… La voix de Zaho de Sagazan a quelque chose d’étrange mais s’impose vite comme familière, puissamment proche. Une sœur ? Une meilleure amie ? Une chamane ? Une psy ? Cette toute jeune femme se déploie dans des chansons à l’improbable carrefour de Barbara et de Koudlam, de Christophe et de Cold Cave, d’une chanson française introspective et de l’électronique héritière de Kraftwerk. Et sa voix charcute les sentiments, ravage les séductions tranquilles de la chanson de fille. Dans son enfance, cette voix la gênait : « J’en ai fait un complexe parce que beaucoup de choses chez moi étaient à l’inverse du féminin et que je ne pouvais pas cacher ma voix. »
Zaho l’a domptée comme elle a dompté la musique, entre acharnement et plaisir. Au commencement, le piano est une affaire de beignets au chocolat – sa récompense après les cours classiques qu’elle prend en 6e. Dégoût. Mais elle y retourne d’elle-même quelques années plus tard. Passion obsessionnelle et autodidacte dont son écriture d’aujourd’hui garde la trace – lancer les mélodies en ligne droite, répéter les mêmes deux accords en boucle jusqu’à l’hypnose…
À l’adolescence, elle se passionne pour la chanson classique, admire l’écriture de L’Écharpe de Maurice Fanon ou Du bout des lèvres de Barbara, qui jouent sur les mots tout en dévoilant la plus intime vérité du sentiment. Parallèlement, elle explore l’électronique sombre qui plonge loin dans l’âme tout en passant par le corps avec furie.Il lui a fallu quelques temps avant de s’admettre en artiste. Elle est tentée par les métiers du soin, dont elle rapproche naturellement l’esprit de son travail de chanteuse – « Je suis la copine qu’on appelle pour parler pendant trois heures. » Mais une loi presque naturelle s’impose : elle ne vient pas d’une famille ordinaire, puisque son père voyage beaucoup avec de spectaculaires performances artistiques. Sur ses cinq filles, trois exercent des professions artistiques. Tout s’est ligué : infiniment rêveuse, Zaho de Sagazan a grandi sous l’injonction maternelle de « se mettre à la place des autres », ce qui est à la fois une vertu charitable et un magnifique poste d’observation. Qu’elle dise « je », « tu » ou « il » dans ses chansons, le sujet est toujours le même : une personne qui aime, souffre, hésite, se regarde dans le miroir, s’explore…
Son écriture passe du spleen à l’extase, de l’ivresse au dégrisement, du désir à la sublimation, qu’elle explore les relations de couple, des fantasmes amoureux, des autoportraits audacieux, des songes troublants ou tout simplement invite à la suivre dans son univers libre et fervent.
On a commencé par voir en Zaho une intemporelle voix d’aujourd’hui. En un an, sa singularité s’est imposée comme un phénomène dans la longue aventure de la chanson francophone, par l’ampleur du saisissement des professionnels (prix de la Révélation Sacem, prix de la Chambre syndicale de l’édition musicale…) comme par le tourbillon médiatique, de la presse aux réseaux sociaux. Elle y ajoute quelques gestes lumineux comme, juste avant Noël, un radieux EP de reprises – La Bonne Étoile de -M-, La vie est belle de Brigitte Fontainer, 99 Luftballons de Nena. Ou ce Modern Love repris de David Bowie et déposé, pendant la cérémonie d’ouverture du festival de Cannes, aux pieds de Greta Gerwig, présidente du jury tombée sous le charme avec un parterre d’étoiles mondiales du cinéma.
Alors si, pendant que Zaho de Sagazan cavale de gloire en gloire et d’astre en astre, on se retourne sur ce qui est survenu depuis la sortie de La Symphonie des éclairs, on ne voit pas une saison étourdissante, mais un événement historique.
À 22 ans, Zaho de Sagazan est attendue comme celle qui peut injecter, avec son timbre expressif de mezzo-soprano, du sang neuf dans la chanson française.
Le MondeSon réalisme poétique touche au cœur, emporté par cette voix qui cogne les âmes sur fond électronique [...] Elle fait l'unanimité cet été sur la scène des festivals.
LibérationRetenez bien ce nom : Zaho de Sagazan est là pour longtemps.
Le FigaroLa future grande de la chanson française. [...] Entre tradition de la chanson française et techno berlinoise [...] À mi-chemin entre Stromae et Brel.
L'OBS