Moriarty, famille recomposée aux secrets multiples s'installe sur scène comme dans une chambre d'hôtel. Une histoire intime qui se tisse entre une diva sensible, un harmoniciste malicieux, un guitariste inspiré, un contrebassiste mystérieux, un amoureux des cordes éclairé et une batterie hybride. C'est un peu le récit d'une disparition, d'une énigme a solutionner, où le public mène l'enquête, sans vraiment démêler tout à fait les fils d'une folk teintée de blues, d'américana et de musiques inconnues.
Inutile de chercher d'où ils viennent, quand et comment ils se sont rencontrés. Tout ce qu'on trouve reste mystérieux et souvent contradictoire. On soupçonne Rosemary et ses cinq frères (Thomas, Stephan, Charles, Vincent, Arthur) de ne pas nous aider, voire de brouiller les pistes.
A écouter les 2 disques qu'on connait d'eux (Gee Whiz But This Is A Lonesome Town, 2007, et The Missing Room, 2011) et les collaborations diverses (bande originale de la pièce, La nuit, un rêve féroce - Mike Kenny, Marc Lainé - 2009, Bande Originale d'Une peine infinie, film documentaire sur le plus jeune condamné à mort aux Etats-Unis de David André, 2011) on se dit qu'il est tout aussi inutile de leur attribuer un genre musical. On peut par contre remarquer qu'Elle et Ils chantent en anglais - version américaine - et que sa voix à Elle, on s'en souviendrait entre mille, et d'ailleurs qu'on avait déjà été traversé par ce chant à la radio à propos d'un certain Jimmy, un bison parti loin de sa terre natale dont les parents réclament le retour à corps et à grognements.
Demander directement aux Moriarty n'est pas plus éclairant. A la question de savoir quelles sont leurs influences ils répondent : Sans aucun doute un orage d'hiver le long d'une rive de plomb nous a beaucoup inspiré. Surtout il a provoqué une coupure de courant dans l'église en bois où nous étions en train de donner un concert. La fin du concert en acoustique et par zéro degrés Celsius (le chauffage ne marchait plus) à été un extraordinaire moment de rock'n'roll et de recueillement mêlés.
A les voir in vivo, on reste ému d'abord par leur extravagante complicité et aussi par la façon dont les chansons les chevauchent comme si eux-mêmes en étaient - sans en avoir conscience - les simples crieurs - haut-parleurs, comme si les chansons et les personnages autour desquelles elles sont construites existent irrémédiablement et immédiatement.
Dans le panthéon Moriarty - version 2007 - on trouve, Lily, une jeune soldate apparemment cousine du groupe qui s'engage dans l'armée des Etats-Unis, Jimmy, le bison sus-cité, Cottonflower, surnom donnée à une femme (un enfant ?) par un homme (aussi soldat ?) en train de mourir dans un champ (de bataille ?).
Dans The Missing Room, recueil sombre et électrique composé - du propre aveu du groupe - on the road, une douzaine de narrations alternant crimes, désamours, vengeances et bonheur factice donnent naissance à de nouveau protagonistes, souvent féminins. C'est à partir de ce matériau que Marc Lainé à écrit et mis en scène Memories From The Missing Room.